En 2018, je rencontre Bruno dans un atelier de danse inclusive, dirigé par Dimitri Tsiapkinis. La complicité s’installe rapidement entre nous, la danse et le contact aidant. Derrière ce regard rieur, je perçois pourtant une personne extrêmement inquiète, se sentant par moment persécutée et souvent délaissée. À certains ateliers Bruno s’émerveille et s’ouvre à la danse, à d’autres il paraît absorbé et ailleurs, se plongeant parfois dans son magazine de pêche.
En mars dernier, prenant connaissance du festival Arts Convergences, je pense tout de suite à lui. Mon activité se concentre de plus en plus sur des portraits-vidéos, ce festival est donc une occasion supplémentaire d’approfondir ce travail. Je l’appelle, il semble très emballé par l’idée d’un échange entre lui et moi à travers ses trois principales activités : les arts plastiques, la pêche et la danse.
Nous cheminerons ensemble pour que j’obtienne sa confiance. Le sujet le met par moment mal à l’aise et le terme « maladie » semble le froisser. A la fois très en demande et repoussant parfois mes questions et ma caméra, la ligne d’écriture à laquelle je m’accroche plie dangereusement et semble pouvoir se briser à tout moment. Bruno me fait marcher sur un fil, son fil,… mon fil… Je me réfère à Dimitri, et Émilie et Claire, deux amies danseuses qui le connaissent depuis des années : « Vas-y, ce projet ne peut lui faire que du bien ». Ces mots me rassurent et me convainquent d’aller jusqu’au bout, jusqu’au bout de ce fil tendu, tendu comme des crins d’archet.